THEATRES MUSICAUX

Trois ouvrages pour la scène. Trois essais pour autopsier l’obscène. Trois espaces performatifs pour refuser les perversions égocentrées de la société hypernarcissique, celle du spectacle permanent, celle de l’autopromotion délirante des miroirs déformants de soi-même. Trois ouvrages pour récuser les doctrines imbéciles de la société nihilo-nombriliste, pour conspuer l’empire du mensonge et de l’hypocrisie lucrative. Cependant, ces théâtres-là ne sont pas seulement le manifeste dissident d’un révolté. Ils sont aussi et surtout un espace d’introspection personnel, où la mise en scène de la critique, par effet de miroir, tend immanquablement à révéler les limites de cette critique et de celui qui l’assume.

“Peu à peu, j’ai découvert que la ligne de partage entre le bien et le mal ne sépare ni les États, ni les classes, ni les partis, mais qu’elle traverse le cœur de chaque homme et de toute l’humanité.” Alexandre Soljénitsyne (1918-2008) in l’Archipel du Goulag

Sur la forme, les voix crient sur des bords de falaises et cherchent à s’émanciper de leur vertige. Les livrets relèvent davantage de monologues juxtaposés que de réels dialogues. Entrelacs de fragments de paroles distribués au gré de temps flexibles. Il y a ce qui est dit et, surtout, ce qui ne l’est pas et qui creuse le sillon dramatique de l’arbitraire et de la folie. De huis-clos en apartés, d’élans oniriques en tableaux plus réalistes, au gré de l’omniprésence musicale, on chemine en tension sur un grand clair-obscur, à la frontière entre le visible et l’invisible où finissent par se dévoiler les combats spirituels les plus intenses.

HISTOIRE D’UN APRES-MOI

Sur scène, deux récitants cohabitent avec un quintette. Dans l’esprit d’un Pierrot Lunaire post-Covid s’engage la mise en scène de 21 textes poétiques aux déclamations contrastées. Eclats de voix autoritaires, gémissements mielleux, tristesse des profondeurs, exubérances démonstartives, ivresses, drôleries, colères, angoisses… une explosion d’émotions instables déferlent au gré des déclamations et des variations d’humeurs. Derrière ce cheminement chaotique se dévoile un réquisitoire implacable contre l’écume d”une société à la dérive. Toutefois, chemin faisant, le volcan connaîtra l’accalmie, laissant entrevoir une forme de percée de lumière à la sortie du tunnel.

Maquette enregistrée en janvier 2023 par Claire Devere & Arnaud Biais

L’OPERA INTERSECTIONNEL.LE

Témoin et survivant des années folles, j’ai cherché la voie juste et équilibrée de la déconstruction. Déconstruction dont “on” m’a régulièrement expliqué qu’elle est nécéssaire au progrès humain, voire à la survie de la planète. Pour ma part, en résumé, il m’a fallu réfléchir sur mon illégitimité fondamentale à exister et parvenir à déconstruire au moins trois dimensions fondamentalement problématiques et interdépendantes : 1. mes privilèges économiques, 2. ma blanchité raciste, 3. ma masculinité toxique. Ainsi, après beaucoup de travail, cette (en)quête post-patriarcale m’a conduit vers cette performance artistique radicale. En attendant mieux.

CANTIQUE DES DEGRES

Entre septembre et octobre 2020, le monde entier évolue sous le joug de la crise sanitaire COVID 19. Les normes sociales et anthropologiques sont durablement bousculées. Dans la crainte d’une deuxième vague épidémique et d’un effondrement économique, un climat anxiogène s’installe dans la société française où se superposent de vives tensions sociales, des défiances politiques, des catastrophes naturelles, des mutilations de chevaux… Un enseignant adresse au Président de la République une série de courriers en décidant parallèlement de refuser l’obligation de porter le masque devant ses élèves. Tandis que la question d’une forme d’objection de conscience est posée, les violences mimétiques qui s’exercent autour du sujet engagent un cheminement initiatique profond. L’occasion d’interroger la place de la liberté individuelle, les limites du narcissisme et les difficultés à demeurer dans l’intégrité. Dans l’espace scénique, les personnages évoluent librement autour de 9 instrumentistes à cordes omniprésents.